Planter


« Planter c’est caresser le temps »….

Les plantations apportent la notion croisée du temps qui passe et du temps reconduit à travers le rythme des saisons. Les arbres traversent parfois le temps plus sûrement que les bâtiments et les activités humaines.

Mais les plantations sont également des êtres vivants fragiles. Il est préférable de choisir des essences qui correspondent au climat, au sol et à l’entretien qui pourra y être apporté.

Il s’agira donc de définir un projet de plantations qui corresponde à des plantations nécessitant le moins d’entretien afin de garantir aux plantes retenues de pousser le plus naturellement possible.

Le plan de plantation définira plusieurs secteurs de plantations en fonction des choix effectués non seulement en terme de biodiversité mais également d’ambiance et d’esthétique souhaitées. Ces différents secteurs, eux-mêmes sous-secteurisés, constitueront un ensemble où les continuités biologiques seront essentielles. Le choix des essences relèvera à la fois d’un souci de cohérence botanique sur l’ensemble et d’adaptabilité à chaque secteur, à chaque usage et à chaque fonction.

Le plan de plantation tiendra compte des ombres portées des bâtiments et des murs, et du passage du soleil tout au long de l’année. Ainsi s’agira-t-il de mettre en place une végétation adaptée aux différents endroits et produisant une ambiance d’ensemble aux différentes époques. La palette végétale est riche, très riche, pour que nous puissions ainsi créer des secteurs très diversifiés et adaptés.

Associer botanique et usage collectif :

Le choix des essences doit se faire en fonction des sols, des usages des espaces et de l’entretien. Nous militons avec tous les Services Espaces Verts avec qui nous travaillons, pour une gestion différenciée basée sur la prise en considération des différences de traitement suivant les milieux et une gestion sans produits chimiques (désherbants, insecticides, engrais) et sans arrosage.

En s’assurant de respecter ce choix « tri-phasé », le paysage végétal est garanti d’une pérennité et d’une adéquation aux usages et aux ambiances souhaitées pour les espaces publics.

De manière générale, nous cherchons toujours à mettre en place un paysage végétal qui soit immédiatement efficace tout en assurant la pousse d’essences lentes pour conforter l’ossature arborée dans plusieurs dizaines d’années. Les aménagements paysagers font partie intégrante du projet global en apportant couleurs, lignes et mouvements ; ils participent de l’ambiance de chaque espace changeant avec les saisons et évoluant avec le temps. Le choix des plantations doit être conscient des aspects au printemps (floraison), en été (fruits), en automne (feuilles) mais aussi en hiver (écorces) de manière à donner une leçon de persévérance et de vie.

Les différentes strates : arborée (+ de 12 m), arbustive (- de 12 m) et herbacée (- d’1 m), construisent l’espace et les rythmes car la strate basse connaît plus de changements du fait du nombre important de fleurissements du printemps à l’automne que la strate arborée qui ne connaît que le changement du feuillage avec les saisons.

Les habitants sont sensibles à l’aspect "esthétique" des plantes, notre rôle de paysagistes consiste à prendre en compte cette attente en proposant des floraisons et des couleurs de feuillages qui apporteront un "embellissement" au cadre de vie des logements.

Les plantes à travers les jardins, les arbres d’alignements ou les parterres, occupent l’espace de manière progressive en poussant. Les plantes recadrent l’espace en y apportant des dimensions intermédiaires avec le bâti.

Notre rôle est d’édifier l’amorce d’un paysage qui devra vivre avec les habitants du quartier. Au fil des saisons, les plantes, et plus particulièrement les arbres, vont développer des événements : fleurs, feuillages, fruits qui vont construire une ambiance, un climat, un corps changeant à ce quartier. Il s’agit donc de mettre en synergie les grandes lignes des changements et des événements que la nature peut proposer.

Gestion différenciée :

Dans le choix des essences et l’élaboration du plan de plantations, il s’agira de différencier les différents types de gestion en fonction des usages, cherchant à réduire les coûts d’entretien. Mais surtout la recherche d’une gestion réduite permet d’imaginer des types de reprises de la végétation là où l’artificialisation avait tué le naturel.

Dans la Ville de Cherbourg où nous réalisons 2 grands parcs, la collaboration avec les services a permis de planter des essences ne nécessitant aucun arrosage.

Avec les services de la Ville d’Auxerre, une gestion différenciée des espaces de l’éco-quartier permet d’entretenir le plus naturellement possible les vastes espaces plantés.

Nous expérimentons avec les villes de Sedan, Auxerre et Cherbourg, la végétalisation progressive des zones non-fréquentées des sols stabilisés en laissant d’abord pousser spontanément la végétation sur les espaces non-piétinés puis en amorçant une reprise par ensemencement.

Les bâtiments qui bordent le square et le passage Saint Clément rejettent leurs eaux dans les réseaux. Il serait intéressant de récupérer cette eau pluviale pour irriguer le square et le jardin linéaire du passage Saint Clément.

La question de la gestion des espaces naturels doit faire l’objet d’une concertation, d’une sensibilisation et d’une participation des habitants, grands et petits, à travers les actions des écoles et les Comités de Quartier.

La découverte botanique est un bon vecteur de sociabilité.

Communiquer à partir des plantes :

Pour que les habitants, et notamment les enfants, respectent les plantations, il est nécessaire qu’ils les connaissent mieux.

Suivre, voire participer, aux plantations, et à l’entretien sont certainement de bons moyens mais peu de gens en ont la disponibilité. Il est donc utile de communiquer autour des plantes présentes sur le quartier par des fiches et des informations sur chaque espèce. C’est ainsi que l’on peut montrer que de nombreuses « mauvaises herbes » étaient utilisées dans la cuisine et le sont toujours dans la pharmacopée. Il est aussi intéressant de montrer d’où viennent originellement les plantes qui, quoique étant considérées comme indigènes, ne le sont que depuis peu de temps. Les racines de la Bardane étaient consommées comme des salsifis et utilisées en décoctions contre les infections. Les feuilles et même les tiges du Laiteron se mangeaient en légumes, en soupe, et en salade pour les jeunes pousses tout en servant de plante fourragère pour les oies.

Les enfants sont un public attentif mais ils sont aussi de bons colporteurs d’informations auprès des adultes. Montrer à un enfant qu’une branche d’Aulne qui se casse si aisément peut devenir dure comme du fer en restant trempée dans l’eau ; lui expliquer que c’est pour cela que ce bois était utilisé pour faire des sabots, des plats et des outils, mais aussi des pieux de fondations, et lui révéler que Venise est fondée sur des pieux d’Aulne, c’est lui permettre d’accéder à plus de proximité avec l’Aulne en le connaissant mieux. On peut continuer quand il arrive en classes supérieures et lui développer les autres qualités de l’Aulne : les feuilles et les bourgeons ont une action d’oxygénation, de rajeunissement sur le métabolisme humain et servent pour les affections de la région ORL et d’autres troubles de la microcirculation cérébrale ; l’écorce a été nommé le « Quinquina de l’Europe » et peut être utilisée pour les fièvres intermittentes, etc....
En lien avec les espaces plantés, la pédagogie sur la faune associée : oiseaux, petits rongeurs, batraciens, reptiles, insectes, etc... peut s’organiser grâce à des abris (les murets de pierres en sont déjà) jusqu’à envisager la mise en place de ruches.

C’est ainsi que de la maternelle au lycée il est possible et souhaitable de mobiliser l’intérêt des enfants que les espaces plantés de leur quartier. Communiquer sur les espaces plantés et sur les plantations c’est révéler aux habitants la richesse de leur quartier. C’est aussi réduire les agressions et les dégradations.

Les « jardins partagés » recouvrent plusieurs types de partages et de jardins. Afin d’assurer l’indispensable aller-retour de la connaissance à la pratique, certains de ces jardins peuvent être attribués aux écoles ou aux associations mettant en place une pédagogie précise sur les plantations.